En voilà le froid revenu, et avec lui, le besoin de se tenir au chaud... et de reprendre les expérimentations.

Au fil des bains de teinture, que ce soit avec de l'indigo ou du pastel, j'ai accumulé toute sorte de laines, dans plein de nuances de bleus, plus ou moins clairs, plus ou moins denses. Mes doigts ont donc repris le chemin du tissage instinctif.

Toujours le même concept, d'un tableau tendu entre quatre branches de bois flotté, sur lequel je joue avec les textures, les nuances, en gardant régulièrement une touche de laine naturelle non teintée, histoire de redonner la base.

Dans cette petite promenade légère aux vapeurs d'indigotine, se sont nichées aussi quelques zones en fibre de ramie, teintée au pastel elle-aussi, qui apporte une brillance différente.

Tous ces bleus sont pour moi comme des amis, chargés de l'histoire des plantes ramassées au bord des routes.

Ils arrivent dans ma vie au gré des cuves de teinture, comme autant de miracles qui se renouvellent saison après saison.

Je crois qu'il y aura d'autres tableaux bleus en tapisserie spontanée, cette couleur me chante à l'âme !

Il y a cette année une très belle exposition autour de la couleur pourpre au Muséal d'Alba-la-Romaine en Ardèche.

On y rencontre des objets, teintés, peints, en violet et pourpre, et pas mal d'explications historiques ou techniques autour de ces couleurs, de leur place dans les sociétés antiques.

Dans une partie de l'exposition consacrée plus spécialement aux vêtements et textiles teints en violet, j'ai croisé des étoffes présentées comme teintes avec 2 bains, de cochenille et de pastel....

Rien de mieux pour me donner envie de m'y essayer à mon tour!

J'ai préparé trois écheveaux pour ces premiers essais, que j'ai d'abord teints à la cochenille

(1er bain, le plus foncé, 2e bain, 3e bain...)

Plus tard, j'ai préparé une cuve de pastel, toujours avec des feuilles fraîches cueillies sur les talus où pousse l'isatis tinctoria à l'état sauvage .

J'ai commencé par plonger l'écheveau le plus foncé dans la cuve de bleu, et je l'y ai remué pour essayer d'avoir une couleur uniforme... Lorsque je l'ai ressorti et qu'il s'est oxydé, j'avais un magnifique violet pourpre, j'étais ravie!

Comme je voulais tenter d'obtenir des violets plus bleutés, ou "lilas", j'ai laissé moins longtemps les écheveaux les plus clairs... Les teintes sont en effet très différentes, mais j'ai dû mal les remuer, il y a des irrégularités dans la teinte.

Je suis cependant assez contente de ces premiers essais!

Dès que j'ai le temps, je recommence !!!

C'est la saison de l'Isatis Tinctoria en fleurs... l'occasion ou jamais de repérer son habitat afin de pouvoir revenir tout au long de l'année récolter ses jolies feuilles bien charnues pour en tirer ce bleu si doux que j'apprends peu à peu à apprivoiser. Quand on lit les fiches botaniques de certains sites, il paraîtrait qu'il pousse dans les zones fraîches, ou encore dans des terrains plutôt calcaires... Il ne doit pas être si difficile que ça parce-que j'en trouve dans notre nord-Ardèche au sol anciennement volcanique, (point de calcaire par chez nous), et il fleurit joyeusement sur les bords de chemins très secs et ensoleillés, voire sur des murailles empierrées avec presque pas de terre...

Repérer son biotope, savoir que dans les prochains mois il va s'y ressemer en abondance...

Un petit frisson intérieur à l'idée de pouvoir tout au long de l'année préparer de belles cuves pour jouer avec les bleus!

Quand on se promène sur les pages internet, on croise de multiples magnifiques réalisations venues du monde entier, où l'indigo joue avec les fonds blancs des tissus pour des résultats toujours surprenants.

L'idée était tentante d'en essayer plusieurs méthodes, avec fils de fronces, avec nouages, avec objets enserrés par des élastiques... Mais je ne voyais pas trop l'utilité de faire des exercices sur des morceaux perdus, alors j'ai construit un projet de tunique. Dans mon esprit, l'idée était de faire une sorte de patchwork de motifs sur le devant, et une bande de motifs placés sur le pourtour en bas. J'ai préparé tout ça sur deux morceaux de toile de lin assez fine. ça occupe!

Ensuite, les deux morceaux et les pièces prévues pour les parementures du haut sont passées dans la cuve de pastel.

Une fois sorti et oxydé, le devant ressemblait à ça :

Le dos était plus sobre, mais du coup, je n'ai peut-être pas été assez attentive lorsque je l'ai trempé dans la cuve, il comporte de multiples irrégularités sur sa surface unie, sans doute dues à un trempage trop rapide, avec bulles d'air?

Après un long travail de patience à retirer tous les fils froncés, les élastiques, les perles...

Voici l'ouvrage en train de sécher.. résultats variés selon la manière dont j'ai réalisé les réserves en blanc.

Après encore un petit travail de couture pour réaliser la tunique, voici le rendu, assorti au foulard de soie!

Comme j'ai enfin la satisfaction de réussir à chaque fois mes cuves de feuilles de pastel fraîches, j'ai décidé d'en profiter pour tenter de nouveaux apprentissages, et entre-autre la technique du shibori.

Pour commencer, j'ai visionné des tas de sites sur internet, des blogs, des tutos, vu des dizaines de photos pour comprendre comment ça marche, cette manière de 'réserver' du blanc quand on trempe dans une cuve.

Et j'ai imaginé un premier projet, avec des dessins réguliers... Pas du tout sûre de mon coup!

Sur ma robe, j'ai tracé des emplacements des futurs motifs, puis je les ai froncés avec un fil solide.

La cuve s'est bien passée, c'était un peu étrange le volume de cette robe quand tous les fils étaient tirés, j'ai oublié de faire une photo... j'y penserai la prochaine fois !! Ensuite j'ai laissé s'oxyder la couleur, puis rincé, et retiré les fils.

Premier essai convaincant!! Il y a encore des tas de motifs de shibori que je voudrais essayer.

Il faudra que je tente d'en mêler plusieurs différents sur un même ouvrage!

Voici la robe une fois sèche:

Elle a changé de style!

Tout à fait portable cet été, non? :)